L’AFRIQUE AU CENTRE DE LA BATAILLE GÉOPOLITIQUE

Imaginez un terrain de jeu mondial où l’on ne tape pas dans un ballon, mais dans des promesses, des contrats en or massif et des milliards de dollars. Ce terrain, c’est l’Afrique, et les joueurs sont les poids lourds de la géopolitique. Ici, tout le monde est sur le terrain : présidents, ministres, chefs d’État, tous prêts à jongler avec les influences internationales tout en essayant de garder le contrôle.

Dans le coin gauche, la Chine, le « sprinteur infatigable » de l’économie mondiale, court sur toutes les routes commerciales avec une endurance déconcertante. Son arme secrète ? Des investissements en infrastructures qui pleuvent sur l’Afrique comme des confettis à un mariage princier : chemins de fer, autoroutes, ponts, ports, tout y passe. La Chine ne fait pas les choses à moitié, elle déroule les milliards avec la même facilité qu’on étend une nappe sur une table de pique-nique.

À sa droite, les États-Unis, « coach de la démocratie ». Ils ne courent pas vraiment, mais se déplacent avec un livre de bonnes manières à la main, prêchant les vertus de la gouvernance, des droits humains et d’élections propres. Ils veulent vendre la démocratie comme un iPhone dernier cri, mais leur garantie inclut souvent un manuel rempli de conditions que personne n’a vraiment envie de lire.

Dans l’autre coin, la Russie, boxeur en semi-retraite qui n’a jamais vraiment décroché. Musclé, un peu rouillé, mais toujours prêt à dégainer ses kalachnikovs et à sortir sa bonne vieille carte des mercenaires. Son créneau ? Sécurité et stabilité pour les régimes qui tanguent comme un bateau en pleine tempête. Pas d’autoroutes ni de ponts chez Moscou, mais des armes, des bases militaires et des « conseillers » qui viennent ajouter un peu de piment au cocktail explosif qu’est déjà l’Afrique.

Et la France ? Fidèle au poste, jouant les prolongations de sa grande aventure coloniale. Comme ces vieux footballeurs qui traînent sur le terrain bien après que le public a arrêté de les acclamer. Elle est partout où ses anciennes colonies se rappellent d’elle, mais son jeu est devenu un peu rouillé. Elle continue de jongler avec des promesses de coopération tout en cherchant désespérément à ne pas se faire déborder par les nouveaux venus.

Dans cette valse géopolitique, on pourrait penser que les pays africains jouent le rôle de spectateurs passifs, simplement en attente du prochain investissement ou du prochain accord commercial. Mais détrompez-vous ! Ils jonglent, négocient, marchandent. Derrière chaque poignée de main bien médiatisée se cache une tentative désespérée de garder la tête hors de l’eau, d’éviter de se retrouver englué dans des dettes impayables ou de céder une partie de leur souveraineté. Chaque président, chaque ministre cherche à tirer le meilleur parti de ce ballet infernal sans se faire trop écraser.

Alors, qui est le meilleur dans ce jeu d’influence ? Qui saura séduire les gouvernements africains sans les asservir ? Entre les routes de la soie chinoises, les promesses américaines de liberté et de prospérité, et la poigne de fer russe, le choix est cornélien. Une chose est sûre : l’Afrique n’a jamais été autant au centre du terrain, et tout le monde veut lui passer le ballon. La question n’est pas de savoir qui va marquer, mais comment l’Afrique va négocier sa survie dans ce match à haute intensité.

 

DE L’INFLUENCE ÉCONOMIQUE ET POLITIQUE

Sur le terrain africain, la compétition est féroce, et chaque grande puissance déploie ses stratégies avec une précision machiavélique. Ici, on ne parle plus seulement de matchs amicaux, mais d’une véritable course pour l’influence économique et politique. Chaque coup porté, chaque investissement, chaque discours enflammé est calculé pour capter l’attention des gouvernements africains et s’assurer une position stratégique continue. Et au milieu de tout ça, l’Afrique fait du mieux qu’elle peut pour ne pas devenir une marionnette prise dans les ficelles des intérêts étrangers. Ainsi, nous allons au fur et à mesure analyser les ressorts de l’influence économique et politique de la Chine, des Etats-Unis, de la Russie et de la France.

La Chine

S’agissant de la Chine, ce mastodonte de l’économie mondiale ne lésine pas sur les moyens pour séduire l’Afrique. Chaque président africain qui prend la parole aux Nations Unies sait pertinemment qu’un pont, un barrage, ou une nouvelle autoroute est en jeu si les négociations avec Pékin se passent bien. Vous voyez ces belles autoroutes et ces chemins de fer flambant neufs qui surgissent partout ? Ce sont les cadeaux de la Chine, ou plutôt, des prêts enrobés dans un joli papier doré.

Mais ne vous méprenez pas. Derrière les milliards généreusement investis se cachent des conditions dignes des meilleurs contrats de cinéma hollywoodien. Imaginez un film où l’on signe un contrat avec un grand sourire, mais où chaque clause finit par dévoiler que vous devez vendre votre âme pour le rembourser. Prenez le Kenya avec son chemin de fer Mombasa-Nairobi, d’un montant avoisinant les 3,6 milliards de dollars pour un train flambant neuf, mais à quel prix ? Derrière cette modernité se cache une dette à taux préférentiel, mais lourde de conséquences. Si jamais le Kenya n’arrive pas à rembourser dans les temps, la Chine pourrait gentiment demander un port, des ressources naturelles ou une mainmise sur des infrastructures stratégiques. Ah, et tout cela, bien sûr, avec une armée d’ouvriers chinois, car pourquoi embaucher des locaux quand on peut ramener ses propres troupes ? Moralité, la modernité, oui, mais les emplois pour les Africains ? Disons qu’ils ne sont pas inclus dans le package.

Les États-Unis

Pendant ce temps, de l’autre côté du terrain, les États-Unis ont leur propre stratégie. Plus subtils, ils jouent les champions de la démocratie et des droits de l’homme. L’AGOA, leur programme phare, c’est un peu comme le Golden Ticket de Willy Wonka pour accéder aux marchés américains sans droits de douane. Mais ne vous y trompez pas, ce n’est pas un cadeau. Non, c’est une carotte politique. Respectez les règles (élections propres, respect des droits de l’homme, pas de dictature en vue) et vous pourrez entrer dans le club. Mais au moindre écart, Washington n’hésite pas à couper le robinet. En 2020, l’Éthiopie, après quelques troubles politiques, les Américains ont gentiment rappelé à Addis-Abeba que leur accès au marché américain n’était pas un acquis, mais un privilège conditionnel.

Le Millennium Challenge Account (MCA) est l’arme secrète des États-Unis dans leur jeu géopolitique en Afrique. Officiellement, c’est un programme de financement destiné à aider les pays respectant les normes de bonne gouvernance. Un joli nom pour dire « Si tu fais tout comme on te dit, on te file un petit paquet de milliards pour tes ponts, routes et écoles. » Mais attention aux standards de bonne gouvernance et de la stabilité politique. Si tu dévies de leur vision démocratique (coup d’état), les fonds disparaissent aussi vite qu’ils sont arrivés. Ce programme est un parfait exemple de diplomatie économique où l’argent devient l’outil de pression pour aligner les pays sur les intérêts politiques américains.

Les USA ont également l’USAID comme instrument stratégique de la politique étrangère américaine, bien au-delà de son rôle humanitaire affiché. Le soutien qu’elle apporte aux pays africains, sous forme de financements pour l’éducation, la santé, ou les infrastructures, est fortement lié à des intérêts politiques et diplomatiques spécifiques. L’aide n’est pas inconditionnelle tant que les gouvernements bénéficiaires suivent les directives de Washington en matière de gouvernance, de droits de l’homme et d’alignement diplomatique, le flux de soutien reste régulier. Mais dès que ces pays s’écartent de cette ligne, par exemple en se rapprochant de la Chine ou de la Russie, l’aide peut être réduite ou redirigée ailleurs, reflétant les priorités géopolitiques des États-Unis.

La Russie

Concernant la Russie, elle ne s’embarrasse pas avec des projets d’infrastructure ou des promesses de démocratie. Non, elle préfère une approche beaucoup plus directe et, disons-le franchement, musclée. Pas d’élections, pas de grandes théories sur la prospérité. Ce que Moscou offre sont des kalachnikovs, des mercenaires, et un peu de stabilité armée. Pourquoi s’évertuer à construire des ponts ou des routes quand on peut proposer de la sécurité à coups de fusils ? Il y a plusieurs exemples qui peuvent en témoigner. On a la République centrafricaine, qui depuis 2017, a fait appel au « groupe Wagner » que certains qualifient de mercenaires.

Vous allez me demander pourquoi « mercenaires » ? Parce que tout simplement ils ne sont pas là pour l’honneur de la Russie. Non, Wagner n’a rien d’une mission militaire officielle. Ils ne sont pas là pour le drapeau ou les idéaux. Ils sont là pour l’argent, pour les contrats. Wagner offre de la sécurité à louer, tout en veillant à se payer en diamants, or, et autres richesses naturelles. Le deal est simple, vous voulez rester au pouvoir ? Wagner nettoie vos problèmes, et en échange, ils se servent généreusement. C’est là toute la différence. Contrairement aux militaires d’un État, qui servent sous l’autorité de leur pays, Wagner est un groupe privé. Officiellement, Moscou les renie en disant que « les éléments de Wagner sont des entrepreneurs privés, pas nos soldats ! » Mais tout le monde sait que c’est une façade. Wagner est le bras armé discret de la Russie, permettant à Moscou d’étendre son influence sans avoir à se salir directement les mains. Le Groupe apparaît au Sahel, au Soudan, partout où un régime en difficulté a besoin de sauver sa peau. Là où les ponts et les routes ne suffisent plus, Wagner propose une sécurité immédiate.

Les régimes en place, en proie à des rebellions ou à des menaces internes, n’ont pas le temps de se tourner vers des partenaires plus exigeants comme les États-Unis ou l’Europe, où les ventes d’armes sont encadrées par des normes de transparence et des préoccupations sur les droits humains. Avec la Russie, ces complications n’existent pas. Pas besoin de longues négociations, pas besoin de s’assurer que les armes ne seront pas utilisées contre des civils. On passe commande et on reçoit des fusils d’assaut, des chars, et même des hélicoptères de combat en un rapide délai.

La France

Ah, la France ! Ce vétéran des prolongations qui refuse de raccrocher les crampons. Toujours là, fidèle au poste, traînant son héritage colonial comme un vieux trophée terni. Malgré les vents contraires, elle continue d’insister sur son rôle en Afrique, comme un joueur qui reste sur le terrain bien après que le coup de sifflet final a été donné. Ses anciennes colonies africaines ? Elle les considère encore comme son jardin privé, un espace où elle doit absolument garder un pied, même si l’herbe y pousse un peu moins verte qu’avant.

Néanmoins, on pourrait dire que c’est une relation d’intérêt mutuel, même si elle reste déséquilibrée. Mutuellement, il s’agit du fameux franc CFA, cette monnaie qui est arrimée à l’euro comme un bateau au quai. Alors, pourquoi ne pas couper les amarres et voguer vers l’indépendance monétaire ? Eh bien, ce serait un joli rêve, mais en réalité, cet arrimage à l’euro a ses avantages. Les pays utilisant le CFA bénéficient d’une stabilité financière enviable dans une région où les devises locales, elles, vacillent dangereusement. Pas de grandes fluctuations monétaires, pas d’inflation qui explose, bref, un peu de calme dans un océan de turbulence économique. Et ça, pour des économies qui souffrent de déficits de production, ce n’est pas négligeable.

Certes, cela veut aussi dire que la France garde un œil vigilant sur la gestion de cette monnaie, mais les pays africains savent que cette stabilité leur permet d’attirer des investissements étrangers, de rassurer les marchés, et d’éviter la spirale infernale de l’hyperinflation. En gros, c’est un peu comme avoir un vieux parrain influent qui vous couvre. Vous savez qu’il est là pour surveiller ses propres intérêts, mais en même temps, vous profitez de sa protection.

Et puis, il ne faut pas oublier la coopération militaire. Avec des opérations comme Barkhane, la France est bien sûr là pour protéger ses mines d’uranium et autres investissements privés de ses ressortissants. Là aussi, il ne faut pas se leurrer, les régimes africains eux-mêmes ont besoin de cette présence pour garder à distance les groupes armés non étatiques qui menacent de transformer leurs pays en zones de non-droit. Les troupes françaises, c’est en quelque sorte une assurance anti-insurrection qui, oui, protège les intérêts. Alors non, la France n’est pas seulement accrochée à ses anciens titres de gloire coloniale. Elle sait qu’elle doit jongler avec les nouvelles puissances, mais en même temps, les pays africains ne sont pas prêts à la laisser partir trop vite. Parce que malgré tout, cet arrangement un peu bancal, où chacun tire la couverture de son côté, permet à la région de garder la tête hors de l’eau.

En gros les accords bilatéraux servent à renforcer cette présence économique sous couvert de coopération. Toutes ces puissances jouent la carte de la coopération économique, militaire et de la culture, rappelant sans cesse à l’Afrique « On est là depuis toujours, on vous connaît mieux que quiconque. » Mais en coulisses, elles s’assurent que leurs intérêts restent bien protégés. Il ne faut pas se faire d’illusions. Dans cette jungle géopolitique, la vraie question reste comment les pays africains s’en sortiront ou arriveront à se départir entre ces influences sans sacrifier leur souveraineté ?

 

L’AVENIR DES RELATIONS GÉOPOLITIQUES DE L’AFRIQUE

L’avenir des relations géopolitiques en Afrique est une grande énigme, une sorte de suspense permanent où tout le monde se demande si finira-t-elle par se libérer du poids des influences étrangères ou restera-t-elle sous l’égide de la convoitise des toutes les grandes puissances ? Un véritable thriller géopolitique où les retournements de situation sont aussi fréquents que les promesses d’un avenir radieux de développement et de prospérité. Puisque depuis les indépendances à nos jours, on ne fait répéter la même rhétorique d’unité, de progrès et de tout ce qui peut faire rêver. Sans nous leurrer, au fil des ans, à chaque fois on se sent plus proche et en même temps très loin de cet idéal.  Comme une partie d’échecs où on essaie de devenir le joueur principal en se ventant de la jeunesse et de la démographie exponentielle tout en étant continuellement noyée par les défis qui dépassent de loin les solutions proposées du moment.

Agenda 2063 et ZLECAf

Quand on parle de l’avenir géopolitique de l’Afrique, un élément clé se détache. Il s’agit du projet développement de l’Union Africaine, dénommé « Agenda 2063 ». Ce plan visionnaire représente le rêve collectif de voir le continent atteindre un niveau d’indépendance, de développement et de prospérité digne de ses ressources et de ses ambitions. Le schéma consisterait à créer les conditions pour que les pays africains échangent entre eux, construisent leurs propres infrastructures, et aient enfin coupé les fils invisibles qui les lient aux anciennes puissances coloniales et aux nouvelles puissances économiques mondiales.

L’un des grands piliers de cet Agenda 2063 est la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Un projet ambitieux qui vise à créer un marché commun pour plus de 1,3 milliard de personnes, reliant les économies africaines entre elles, tout en réduisant leur dépendance aux importations étrangères. En théorie, cela devrait transformer le commerce intra-africain, stimuler la croissance, et créer un environnement propice à l’industrialisation et à la création d’emplois. Mais là encore, le diable se cache dans les détails.

D’abord, parlons de la dépendance économique, dont malgré tous les beaux discours sur la diversification des économies africaines, la réalité est que beaucoup restent pris dans une dépendance étouffante à l’égard des matières premières. Or, pétrole, cacao… Ces ressources naturelles sont exportées sans transformation, laissant les pays à la merci des fluctuations du marché mondial. Ce qui nous amène à dire en termes terre à terre qu’on vend à bas prix et achète cher. Le tout sans vraiment réussir à sortir de ce cycle infernal où les économies locales sont piégées dans une croissance minée par des crises cycliques. En attendant, le monde (globalisation) continue de se servir sans pitié, parce que c’est de ça qu’il s’agit.

Les défis sécuritaires et politiques

Comment parler de développement quand les conflits armés et les coups d’État sont la norme plutôt que l’exception ? Dans certaines régions, les gouvernements changent plus que les saisons. On a été témoins ces dernières années de la recrudescence des coups d’État, de révolutions en série, du printemps arabes, de la montée du terrorisme, des interventions étrangères, pour ne citer que ceux-ci. On pourrait presque en rire si la situation n’était pas aussi tragique. C’est un peu comme si on essayait de construire une maison tout en la démolissant en même temps.

Or, contrairement aux ambitions exaltées de l’Agenda 2063, de la ZLECAf et de nombreux autres programmes de développement qui sont censés conduire l’Afrique vers un avenir où les échanges économiques régionaux seraient la clé pour surmonter les conflits, à l’image de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), qui a permis à l’Europe de tourner la page des guerres, c’est malheureusement l’inverse qui est en train de se produire. Au lieu de voir émerger une économie intégrée, prospère et stable, capable de mettre fin aux crises politiques et aux coups d’État à répétition, le continent est encore marqué par des troubles internes, des rivalités géopolitiques et une instabilité persistante qui compromettent ces grands rêves d’unité et de développement.

A côté de cela, n’oublions pas l’endettement massif qui plombe les pays africains. Bien sûr, on parle de développement, de construire des infrastructures, mais à quel prix ? La réalité, c’est que ces beaux projets sont financés par des prêts étrangers, en particulier de la Chine, qui, telle une grande pieuvre, enserre de plus en plus de pays dans ses tentacules de dettes. Regardez un peu ce qui s’est passé avec le port de Hambantota au Sri Lanka, un joli cadeau concédé à la Chine pour 99 ans après que le pays n’a pas pu rembourser ses dettes. Croyez-vous que l’Afrique est à l’abri de ce genre de situation ? Si certains pays continuent de s’endetter à ce rythme, on pourrait bien voir des infrastructures africaines passer sous contrôle étranger en un clin d’œil. Que les ancêtres sauvent l’Afrique d’un lendemain où elle se vendra morceau par morceau.

Sans passer à côté du fléau de la corruption, qui gangrène les économies, elle est quand même devenue un défi énorme dans le système de développement. En effet, les investissements directs étrangers ne sont pas entièrement injectés là où il faut, notamment dans les infrastructures, dans les écoles ou dans les hôpitaux. Une grande partie de ces fonds disparaît dans des comptes bancaires bien loin des populations qu’ils sont censés aider. C’est comme si les élites africaines se disaient « Pourquoi s’embêter à construire des ponts quand on peut construire un autre compte offshore ? » Ce qui est sûr, c’est que tant que la corruption continuera de dévorer les ressources publiques, l’Agenda 2063 restera une belle idée, mais vide de sens.

Les ingérences étrangères

Si l’Afrique était une maison en chantier, il y aurait sans doute un panneau « Accès interdit », mais bizarrement, tout le monde semble avoir une clé. Les puissances étrangères ne se contentent pas d’envoyer quelques petites aides économiques, non. En ce sens que le continent africain essaie tant bien que mal de trouver son propre chemin, mais difficile de marcher droit quand on est entouré de mains étrangères qui vous poussent dans toutes les directions à la fois.

Ainsi, cette ces ingérences étrangères s’instiguent par des pressions sur les gouvernements africains en leur demandant de remodeler leurs priorités pour satisfaire des exigences extérieures, au lieu de se concentrer sur les besoins réels de leurs populations. C’est la même chose sur le plan sécuritaire, à travers le déploiement des forces extérieures pour gérer leurs crises internes. Les pays n’ont jamais vraiment l’occasion de développer leurs propres capacités de défense. Cela les maintient dans une position de vulnérabilité permanente, toujours dépendants de l’aide militaire extérieure pour maintenir un semblant d’ordre. Des secteurs clés comme l’agriculture ou l’industrialisation, qui pourraient permettre une vraie autonomie économique, sont délaissés au profit de projets plus alignés avec les intérêts externes.

Ce qui est vraiment ironique, c’est que chaque puissance étrangère justifie son ingérence en disant qu’elle est là pour « aider » l’Afrique à se développer. Pourtant, à chaque nouvelle base militaire, à chaque nouvel accord bilatéral opaque, c’est une chaîne supplémentaire qui est forgée autour de la souveraineté africaine, comme un goulot d’étranglement. Les promesses de développement sont là, mais elles sont toujours assorties de clauses cachées, de conditions imposées, qui transforment cette aide en une espèce de piège. Ce n’est pas du développement, c’est une mainmise déguisée.

Les défis environnementaux

Ajoutons à tout ce qu’on a évoqué plus les défis environnementaux, on y trouve le changement climatique qui frappe l’Afrique de plein fouet. Désertification, sécheresses, inondations, et vagues de chaleur, tout y est. Alors que le continent est à peine responsable de 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, il est l’un des plus touchés par ses effets dévastateurs. Et quand les terres agricoles disparaissent, quand les ressources en eau s’assèchent, que se passe-t-il ? Les populations se déplacent, les conflits s’intensifient, et les gouvernements déjà fragiles vacillent un peu plus. Le changement climatique est devenu une menace existentielle pour le continent. Comment parler de prospérité et de développement quand les moyens de subsistance disparaissent sous le sable ou sous les eaux ?

On pourrait décrire la géopolitique de l’environnement comme un jeu de Monopoly où les dés sont pipés. Pendant que les grandes puissances mondiales parlent de transition écologique et de responsabilité environnementale, l’Afrique se retrouve coincée dans un schéma de destruction. Ce continent, pourtant riche en biodiversité et en ressources naturelles, est devenu la proie des multinationales que les dirigeants africains d’eux-mêmes appellent de leur vœu à venir explorer, extraire, transformer, exporter, revendre et acheter, tout en laissant derrière elles les problèmes écologiques dont les populations subissent les conséquences.

Pourtant, les pollueurs justifient leurs actions au nom du développement. Ils disent haut en qui veut l’entendre « Nous créons des emplois », avec un sourire en coin. Mais ces « emplois » sont temporaires, mal rémunérés, et ne laissent que des blessures ouvertes une fois le filon épuisé. On appelle cela du « développement durable », mais en réalité, c’est tout sauf cela. C’est de l’extraction brute et simple, avec un goût amer de précarité laissé aux populations, tandis que les élites dans une complicité silencieuse, signent des contrats à huis clos, qui les arrosent en rétrocommissions, pots de vin et d’autres avantages non dévoilés. Une poignée d’entre eux se partagent les bénéfices, tandis que la majorité s’enfonce dans la pauvreté.

L’accès à l’eau, aux terres agricoles, aux ressources naturelles, tout devient sujet à conflit. L’instabilité ne naît pas du jour au lendemain, elle germe dans ces territoires où les ressources, autrefois abondantes, se font rares. On le voit et le ressent, c’est réel au Sahel ! Là où autrefois éleveurs et agriculteurs cohabitaient, la rareté de l’eau et des terres fertiles, exacerbée par le changement climatique, a transformé cette cohabitation paisible en confrontation. Les conflits surgissent, les tensions montent, et la stabilité politique s’effondre comme un château de cartes face à la moindre brise.

Pendant ce temps, sur la scène internationale, on multiplie les sommets climatiques. De belles promesses sont faites, des engagements pris, des fonds verts promis, sans jamais atteindre le niveau escompté. Mais sur le terrain, les populations attendent toujours les retombées de ces engagements. La fameuse taxe carbone ? Un joli concept pour les pays riches, une excuse pour continuer à polluer tout en se donnant bonne conscience. Pendant que certains paient cette taxe pour compenser leurs excès, l’Afrique, qui ne contribue qu’à 4 % des émissions mondiales, en paie le prix fort. Et ce prix, c’est la perte des moyens de subsistance, des terres ravagées, des récoltes détruites, et des vies bouleversées. C’est en ce sens que la géopolitique de l’environnement en Afrique n’est pas seulement une affaire de climat ou de biodiversité, c’est une affaire de pouvoir, d’argent et de contrôle. Tant que les ressources naturelles seront exploitées et que les populations ne bénéficieront pas des richesses de leur propre terre, les défis environnementaux continueront d’alimenter les inégalités et les conflits.

Les responsabilités de l’Afrique

Après tout ce qu’on a relaté ci-haut, ne nous voilons pas la face. Si les grandes puissances se pressent pour tirer parti dans l’arène géopolitique et stratégique mondiale, l’Afrique elle-même n’est pas exempte de responsabilité dans ce jeu des intérêts déséquilibrés. On pourrait même dire que le continent a bien son rôle à jouer sur la scène géopolitique. Que ce soit par des choix politiques discutables, de la mauvaise gouvernance, une gestion corrompue des ressources, ou une dépendance volontairement entretenue, l’Afrique ne peut tout simplement pas se contenter de pointer du doigt l’avidité étrangère sans s’interroger sur ses propres failles.

D’abord, il y a la question de la gouvernance. Pendant que la Chine déroule des kilomètres d’autoroutes et que la Russie cautionne les contrats publics-privés des Etats africains avec la société privée du groupe Wagner, qu’en est-il des dirigeants africains ? Trop souvent, ils sont prêts à sacrifier une part de souveraineté pour des gains à court terme, des promesses de projets clinquants, ou même des alliances qui ne tiennent pas compte des intérêts à long terme. Quant à la corruption, c’est un secret de polichinelle. Il suffit d’une poignée de dirigeants prêts à se vendre aux plus offrants pour que des ressources entières disparaissent dans des comptes bancaires offshore, loin des populations qui en ont désespérément besoin.

Ensuite, il y a l’incapacité ou le manque de volonté de bâtir une union forte et solidaire. L’Agenda 2063, la ZLECAf, ce sont de belles initiatives sur le papier, mais elles ne sont qu’autant de rêves tant que chaque État poursuit sa propre voie, englué dans des querelles intestines ou dans des rivalités régionales. Imaginez une équipe de football où chaque joueur décide de courir dans sa propre direction sans jamais passer le ballon. Peut-on vraiment espérer marquer un but ? Non !

Quant à la jeunesse africaine, qui constitue l’une des plus grandes forces du continent, on lui rappelle à chaque fois pour la flatter, qu’elle est l’avenir. Mais encore faut-il qu’on lui en donne les moyens. Plutôt que de la mobiliser pour des campagnes électorales ou des manifestations orchestrées, pourquoi ne pas lui offrir l’accès à des emplois, à l’éducation, et à une voix dans la gouvernance ? Tant que les jeunes resteront en marge, réduits à être des spectateurs, voire des figurants dans le cirque politique, l’Afrique continuera de stagner dans une dépendance et vulnérabilité face à la mondialisation et la géopolitique.

La responsabilité de l’Afrique est donc de se lever et de construire son propre avenir, avec ses propres moyens, et selon ses propres priorités. Tant que les élites préféreront les solutions clés en main et les alliances de complaisance aux choix stratégiques et courageux, le continent continuera d’être un terrain de jeu pour les grandes puissances. L’Afrique a les ressources, la population et les talents pour se tenir debout, mais il faudra plus que des discours et des sommets internationaux. Il faudra une volonté politique réelle, une gestion saine des ressources et une unité d’action. Pour ainsi dire qu’elle doit être prête à prendre ses responsabilités si elle veut changer les règles du jeu. La souveraineté ne se mendie pas, elle se gagne, et elle se protège.

CONCLUSION

La géopolitique, il faut l’admettre, n’a rien d’un jeu pieux entre enfants de chœur. C’est un terrain âpre et sans scrupules, où chaque puissance avance ses pions sans état d’âme, prête à tout pour défendre ses intérêts. Dans cette arène, l’Afrique ne peut se permettre d’aborder la partie avec naïveté ou complaisance. Les enjeux sont bien trop élevés, et chaque décision, chaque alliance a des conséquences qui se font sentir des décennies durant. Car, rien n’est donné, rien n’est acquis. Tout s’arrache, tout se négocie. Les alliances se forment et se défont au gré des intérêts, et l’Afrique, loin d’être un simple terrain d’opportunités, doit se battre pour chaque avantage, chaque contrat, chaque engagement.

Certes, les alliances internationales continueront de se former, et les convoitises des puissances ne disparaîtront pas. Mais au lieu de se laisser emporter dans un carcan de promesses et de partenariats désavantageux, l’Afrique continue à réfléchir sur comment adopter une position de négociation plus à son bénéfice. Même si elle peine à s’approprier son développement en misant sur des structures de bonne gouvernance, des investissements réfléchis et une valorisation de ses potentialités en faveur de ses propres populations.

Cependant, le véritable défi pour l’Afrique est de se doter d’une vision unifiée et d’une stratégie de long terme, en intégrant les ambitions de son Agenda 2063 et les espoirs de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Car, au-delà des milliards investis, des ponts et des autoroutes, il s’agit de construire une Afrique résolument ancrée dans son identité, déterminée à transformer son potentiel en prospérité. Le jour où l’Afrique jouera à armes égales, en définissant les conditions de ses partenariats, alors seulement elle aura gagné bien plus qu’un match, elle aura conquis sa souveraineté.


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