Discours de Son Excellence Monsieur Faure Essozimna
GNASSINGBE, Président de la République Togolaise, à la 79ème
Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies
New York, le 25 septembre 2024
(Seul le prononcé fait foi)
Monsieur le Président,
Excellences, Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Monsieur le Secrétaire Général des nations unies,
Distingués délégués,
Mesdames et Messieurs,
L’histoire des Nations Unies est celle de la confiance dans des réponses collectives aux crises les plus graves. Mais chacun d’entre nous voit bien que nous sommes aujourd’hui à la croisée des chemins :
- d’une part, notre modèle multilatéral et nos institutions vieillissantes ne sont plus à même de faire face aux nouveaux défis, qui sont – convenons-en -d’une complexité inédite ;
- d’autre part, nos discussions comme nos engagements multilatéraux de ces dernières années restent souvent lettre morte.
C’est pourquoi il y a de réelles raisons d’être inquiets quand on regarde l’avenir.
- Inquiets pour le futur de notre planète qui est traversée par des crises complexes.
- Inquiets pour le futur de notre jeunesse au vu des défis dont elle hérite (et je pense bien sûr d’abord aux défis environnementaux).
- Inquiets, enfin, pour le futur de nos institutions qui ne se sont pas adaptées aux réalités contemporaines, et qui ne remplissent plus leurs promesses
Nous n’avons pas le choix : nous ne pouvons pas persister dans des systèmes qui peinent à tenir leurs promesses, et qui ne reflètent plus les réalités du monde. Nous devons nous engager dans une transformation profonde. C’est pourquoi, je me présente devant vous aujourd’hui avec une conviction et une vision claire pour l’avenir :
- ma conviction, c’est qu’un autre chemin est possible. C’est un chemin où la coopération internationale se revitalise, en se faisant plus inclusive et plus respectueuse ;
- ma vision, c’est celle d’une Afrique qui prend pleinement son rôle de partenaire stratégique dans la construction de nouvelles règles de régulation planétaire.
Ma première observation est que mon pays le Togo regarde vers l’avenir avec espoir et détermination
Au Togo, nous travaillons à un développement qui doit être durable, mais aussi équitable et inclusif. Pour cela, nous savons qu’il nous faut bâtir un État fort, visionnaire et protecteur. Nous le faisons en tant que nation, parce que c’est notre responsabilité envers les générations actuelles et futures.
- Cela passe par des investissements massifs dans nos systèmes d’éducation et de santé.
- Cela passe par la réduction de la fracture numérique.
- Cela passe aussi par notre engagement dans la transition écologique comme par notre action en faveur de l’égalité de genre.
Ma deuxième observation, c’est que regarder vers l’avenir aujourd’hui, c’est regarder vers l’Afrique.
Notre continent n’est plus seulement une région en développement ; c’est tout simplement le prochain moteur de la croissance mondiale.
- Car d’est en Afrique que se trouve et se trouvera encore pour longtemps la jeunesse mondiale. C’est là que se trouvera le potentiel de développement le plus fort pour les marchés émergents liés à l’innovation technologique et à l’entrepreneuriat.
- C’est notamment en Afrique que l’économie verte et bleue offre des opportunités considérables pour un développement durable.
Notre continent est riche en ressources naturelles. Correctement exploitées, elles peuvent transformer l’Afrique en un pôle mondial d’énergie propre et renouvelable.
- C’est aussi là que nous devons expérimenter les nouveaux modèles de partenariats dont nous avons besoin, notamment entre le secteur privé et le secteur public.
Ma troisième observation que je voudrais faire, c’est que la réponse aux défis de notre temps suppose une coopération multilatérale efficace
Les défis alimentaires, sécuritaires ou écologiques dépassent ce que chaque pays est capable de gérer efficacement à lui seul. De plus, il s’agit de crises fondamentalement asymétriques. Ces crises qui impactent rapidement et durement des régions du monde qui ne sont pas directement responsables de leurs causes. C’est pourquoi je redis ici ma conviction profonde :
– d’abord, face à ces menaces globales, il n’y a d’avenir meilleur pour les générations actuelles et futures que dans l’action collective et coordonnée de nos États ;
– et, ensuite, cette action collective doit se mener à l’intérieur de cadres politiques mondiaux rénovés.
- Ceci est vrai, en particulier, pour nos efforts d’adaptation et de résilience climatique.
L’Afrique est l’une des régions les plus vulnérables aux effets du changement climatique. Et cela, bien que nous contribuions le moins aux émissions de gaz à effet de serre.
Les effets délétères en Afrique du changement climatique en termes de sécurité alimentaire et ses conséquences migratoires ne peuvent plus être sous-estimés. Si nous n’y veillons pas, la question environnementale sera à l’origine de grandes vagues de migration vers le Nord, ce qui – à l’évidence – en fait un sujet commun.
- Mais ce besoin d’action collective est vrai aussi du défi de la paix et de la sécurité.
Et ce défi, non plus, ne peut plus être le fardeau des seuls Africains.
En Afrique de l’Ouest, nous faisons face aux menaces persistantes du terrorisme. Selon moi, la réponse repose sur une combinaison de dialogues inclusifs, de réformes sécuritaires et d’initiatives de développement économique pour éradiquer les causes profondes de la violence.
Mais nous ne résoudrons pas tous ces défis seuls. La coopération multilatérale est nécessaire pour faire face à cette menace collective.
Nous le savons tous ; le développement, la transition climatique comme la sécurité sont devenus des sujets qu’il faut aborder de façon multilatérale. Mais pour cela, il faut d’abord réinventer notre modèle de coopération internationale. Et ceci me conduit à ma dernière observation.
Il n’y aura pas de coopération internationale renforcée sans un nouveau modèle de partenariat, plus équitable et plus respectueux des États africains
Nous avons un besoin urgent de réinventer le modèle du multilatéralisme pour rééquilibrer les efforts dans la coopération internationale. Dans ce cadre, notre continent l’Afrique mérite une attention particulière.
- Tout d’abord, il faut avant davantage de respect et de dignité pour les États africains sur la scène internationale.
Il est temps de reconnaître que nous sommes des acteurs stratégiques à part entière, capables de contribuer de manière significative aux efforts mondiaux pour la paix, le développement durable et la dignité humaine.
Le respect de la dignité humaine n’est pas seulement un principe qui doit guider l’ensemble de nos actions quotidiennes à l’intérieur de nos frontières.
Le respect et la dignité de nos peuples doivent être reconnus à travers leur représentation et surtout l’importance donnée à leur voix, qui doit s’exprimer et être respectée dans les fora internationaux.
- Ensuite, Il faut un nouveau modèle de coopération internationale qui s’appuie plus largement sur la localisation. Les solutions « universelles » imposées de l’extérieur peuvent, c’est vrai, avoir quelques vertus mais elles n’ont que très partiellement fait leurs preuves.
Malgré les efforts de ces dernières années, l’aide internationale reste trop souvent déconnectée des besoins et des capacités d’agir des populations qui en bénéficient. La localisation doit être un engagement profond à reconnaître l’expertise locale en permettant aux États de jouer leur rôle dans la définition des priorités et la mise en oeuvre des programmes.
Le Togo est résolu à être un acteur de premier plan dans cette transformation. Je lance un appel à tous les acteurs internationaux pour qu’ils soutiennent une coopération plus équitable et respectueuse.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
L’Afrique est prête ; elle est prête à jouer le rôle qui lui revient sur la scène internationale.
Mais elle aspire à être respectée, écoutée et soutenue dans ses efforts de manière équitable.
Ensemble, travaillons à construire un monde où chaque nation, chaque individu, peut vivre avec dignité, en harmonie avec les autres et avec notre planète.
Je vous remercie.
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